Privée de leurs principales bases, les forces de la coalition Khmers rouges-FNLPK-ANS se réfugient dans la jungle et continuent de mener des actions de guérilla. Sihanouk était convaincu que la république populaire de Chine, et non les États-Unis, prendrait in fine le contrôle de la péninsule indochinoise et que « nos intérêts sont mieux servis en traitant avec le camp qui, un jour, contrôlerait l'ensemble de l'Asie – et en traitant avec lui avant sa victoire afin d'obtenir les meilleures conditions possibles »[11]. Des rumeurs commencèrent alors à circuler relatives à une possible offensive nord-vietnamienne visant Phnom Penh elle-même. La crise était surmontée dans l'immédiat mais elle eut deux conséquences tragiques : elle poussa des milliers de nouvelles recrues dans les rangs des maquis communistes de la ligne « dure » — que Sihanouk qualifiait de Khmers rouges — tandis que, pour la paysannerie, le nom de Lon Nol était désormais associé à une répression impitoyable à travers tout le Cambodge[33]. Sihanouk, prenant acte du désaveu populaire envers les Khmers rouges, peut renoncer au projet d'un gouvernement d'union nationale qui inclurait les hommes de Pol Pot : le 14 juin, l'assemblée constituante issue des élections lui remet les pleins pouvoirs pour constituer un gouvernement. Pour contrebalancer la marée montante des conservateurs, il nomma les dirigeants du groupe qu'il avait réprimé en tant que membres d'un « contre-gouvernement » destiné à surveiller et critiquer l'administration de Lon Nol[18]. A partir de 1968, le Président Nixon profite de la Détente pour tenter de mettre fin à la guerre. Le 9 août 1973, un B-52 Stratofortress largue par erreur 108 bombes Mark 82 de 230 kg sur le village de Neak Luong, faisant 137 morts et 300 blessés[105]. Les réfugiés, dont beaucoup périssent du fait des mines antipersonnel dont le Cambodge est truffé, sont renvoyés dans leur pays par les autorités thaïlandaises dans des camps, notamment dans la province de Preah Vihear, où les conditions de vie sont plus que précaires. Un quinzième des civils réquisitionnés meurent à la tâche, victimes de la sous-alimentation, de la charge de travail ou du paludisme. Ce gouvernement du Kampuchéa démocratique continue d'être reconnu par la communauté internationale (à l'exception des pays communistes du Bloc de l'Est et du COMECON) et il conserve des ambassadeurs à l'ONU et en France. La majorité des citadins éduqués ou appartenant à la classe moyenne étaient las des frasques du prince et se félicitèrent du changement de gouvernement[59]. Le Viêt Nam est donc obligé de renforcer encore ses effectifs militaires, ce qui accentue a dépendance envers les fournitures soviétiques. Le 29 janvier, Lon Nol proclama un cessez-le-feu dans tout le pays. Il agit ainsi avec l'intention de « jouer une nouvelle carte, puisque les communistes asiatiques nous attaquent déjà avant la fin de la guerre du Vietnam »[41]. Dès le lendemain de la chute de Phnom Penh en avril 1975, une partie des troupes khmères rouges reçoit l'ordre de se porter sur la frontière vietnamienne, et des escarmouches les opposent aux Bộ đội nord-vietnamiens dans le courant du mois de mai. L'objectif de Son Sann et de Sihanouk est d'exister militairement pour ensuite peser lors d'éventuelles négociations à venir. Il entreprend à son tour de fonder sa propre armée et, dans ce but, organise en mars 1981 le rassemblement de ses fidèles en faisant transporter les troupes du MOULINAKA en territoire khmer, à la frontière thaïlandaise près de la province de Surin : les anciennes troupes de Kong Siloah sont rejointes par dix mille partisans du prince, avec qui ils fondent l'Armée nationale sihanoukiste (ANS), laquelle constitue le bras armé du FUNCINPEC[11]. : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article. Trente-huit ans après avoir renoncé au titre de roi et vingt-trois ans après avoir été chassé du pouvoir, Norodom Sihanouk redevient monarque du Cambodge[47]. Le FUNCINPEC remporte 45 % des suffrages et le PPC de Hun Sen 36 %. Dans les zones « libérées », il était tout simplement dénommé Angkar — « l'organisation ». Le Viêt Nam accepte en réponse de se retirer dès septembre 1989 : le 5 avril 1989, le retrait unilatéral et sans conditions de l'armée vietnamienne est confirmé. Si la population cambodgienne avait initialement su gré aux Vietnamiens de les avoir débarrassés des Khmers rouges, les opérations militaires rendent bientôt les occupants impopulaires, l'entrée au Cambodge de près de 500 000 immigrants vietnamiens achevant d'épuiser leur crédit. Le nombre de victimes ne sera jamais publié, mais des sources font état de plusieurs centaines[27]. Tous affirmèrent qu’ils préféraient partager le sort de leur peuple[note 8]. En juillet 1990, les États-Unis cessent finalement de soutenir les Khmers rouges[46]. Son Sann en est le Premier ministre et Khieu Samphân le vice-Premier ministre chargé des affaires étrangères. La défaite était directement imputable au nouveau Maréchal qui en avait supervisé les préparatifs. Après le coup d'état de Lon Nol, le « Bureau Central pour le Sud-Vietnam » fut évacué le 19 mars 1970. Si plusieurs intervenants ont affirmé – sans le prouver - que les autorités militaires basées à Saïgon étaient au moins au courant de ce qui allait se passer, voire aurait apporté leur soutien aux « conjurés », Il n'a jamais été possible de prouver l’implication de l'agence américaine dans la conduite de ces événements[56]. Le corps des officiers des Forces armées nationales khmères était généralement corrompu et cupide[84] : la reprise dans les états d'effectifs de « soldats fantômes » permettait des fraudes massives au niveau des états de soldes, les rations étaient détournées tandis que les hommes mouraient de faim et la vente d'armes et de munitions sur le marché noir — ou même à l'ennemi — était de pratique courante[85],[86]. Sihanouk est renversé en 1970 par un putsch de la droite cambodgienne, qui proclame le régime de la République khmère. Ieng Sary, qui a perdu en influence au fil des années au sein des Khmers rouges, s'inquiète des tiraillements internes au mouvement : il répond aux offres du général Nhiek Bun Chhay et, le 8 août 1996, annonce sa rupture avec Pol Pot et son ralliement aux forces gouvernementales. Le 11 mars 1967, alors que Sihanouk se trouvait en France, une rébellion éclata près de Samlaut, lorsque les villageois en colère attaquèrent une brigade de collecteurs d'impôts. Pour ne laisser planer aucun doute sur ses intentions, un film sur l’exécution publique d’agents khmers Serey récemment arrêtés fut diffusé dans l’ensemble du pays[28]. Dans le contexte de la guerre froide, ce conflit fut exacerbé par l'influence de la guerre du Viêt Nam, et les actions des alliés des deux parties belligérantes. Ce n'était pas un hasard : le déplacement de leur effort de guerre sur le théâtre sud-vietnamien des troupes nord-vietnamiennes permit aux Khmers rouges d'appliquer leur doctrine et leur politique sans retenue pour la première fois[112]. Sihanouk s’était assigné trois objectifs principaux, à savoir mettre un terme à la crise politique et à la rébellion à Battambang, résoudre les dysfonctionnements de l’administration et enfin trouver une solution au problème de déficit budgétaire[32]. Les SAS britanniques entraînent les troupes khmers rouges [21]. Fin 1973, il y eut une prise de conscience croissante au sein du gouvernement et de la population du fanatisme, de l'absence totale de préoccupation pour les victimes et du rejet total de toute offre de pourparlers de paix qui « commença à suggérer que le fanatisme des Khmers rouges et leur capacité de violence étaient plus profonds qu'on ne le soupçonnait »[108]. De 1972 à la mi-1974, les insurgés formèrent des unités de la taille du bataillon et du régiment. Le Premier ministre cambodgien refuse par contre tout pardon à Ta Mok. Il vivra dans la clandestinité, entre Cambodge et Thailande, et sera arrêté en 1997, un an avant sa mort d’une crise cardiaque, mais ne sera jamais jugé pour son rôle déterminant dans le génocide. Il sera rejoint peu après par Norodom Sihanouk qui viendra se faire soigner dans le sud de la France à partir de janvier 1970. En 1987, la France et l'Australie lancent le projet d'une conférence internationale chargée d'élaborer un plan de paix : les tractations sont cependant destinées à buter durant plusieurs années sur la place à réserver aux Khmers rouges[40]. D'ailleurs, la guerre actuelle est relativement peu coûteuse en vies humaines6, et l'on observe que la première cause d'hospita1isation au Cambodge n'a plus pour origine les blessures par balle mais celles provoquées par les mines. En tout, 82 ressortissants américains, 159 Cambodgiens et 35 citoyens de pays tiers furent évacués. L'intervention américaine au Cambodge (en particulier les bombardements massifs) a finalement contribué au renforcement du mouvement khmer rouge[note 2], dont les effectifs passèrent de 4 000 en 1970 à 70 000 hommes en 1975[4] et à leur prise du pouvoir. Le 1er juin, Norodom Ranariddh rencontre Khieu Samphân à la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande. Les Khmers rouges constituent l'obstacle principal, car le gouvernement de Phnom Penh refuse catégoriquement leur participation au gouvernement de coalition. À Phnom Penh, alors que Sihanouk était rentré, des étudiants de gauche manifestèrent contre Lon Nol. À partir de 1983, le gouvernement de Margaret Thatcher envoie les SAS, les forces spéciales britanniques, former les Khmers rouges aux technologies des mines terrestres. Le gouvernement cambodgien fut principalement soutenu par des campagnes américaines de bombardements aériens massifs et des aides directes matérielles et financières. Alors que se déroulaient ces événements, Lon Nol démissionnait de son poste de Premier ministre pour raisons de santé et se rendit en France pour se faire soigner. Son Ngoc Thanh, le dirigeant nationaliste de retour au Cambodge, pensant son heure, venue laissait entendre qu’il accepterait – si on le lui demandait – d’occuper à nouveau le poste de premier ministre qu’il avait déjà brièvement tenu en 1945. Dans le même temps, Sihanouk perdait le soutien des conservateurs du Cambodge à la suite de son échec à venir à bout de la détérioration de la situation économique, encore exacerbée par la diminution des exportations de riz — qui allaient pour l'essentiel à l'armée nord-vietnamienne et au Việt Cộng [note 4] — et de la présence militaire communiste croissante. Avec les encouragements probables des cadres communistes locaux, l'insurrection se répandit rapidement dans toute la région[21].